La magie n’est pas obligatoire dans un jeu de rôle, mais il faut reconnaître qu’elle est très souvent présente. Même dans des univers types l’Appel de Cthulhu, où les personnages n’ont pas de pouvoir magique en soi, elle reste présente sous forme d’entités.
Dans un jeu de rôle, la magie est à la fois un outil de gameplay, mais aussi un outil narratif ! C’est elle qui va créer du “merveilleux” dans l’histoire qu’on se raconte ensemble.
Aujourd’hui, on va passer en revue plusieurs idées pour construire un système de magie cohérent que tu vas pouvoir intégrer à ton univers.
Quel est l’intérêt de la magie dans un jeu de rôle ?
Lorsque tu conçois ton propre univers de jdr, une notion très importante à prendre en compte c’est de laisser la possibilité à tes joueurs de s’exprimer. On ne parle pas ici d’expression orale, mais plutôt d’exprimer sa façon de jouer et la façon dont on veut concevoir son propre personnage.
Par exemple, tu peux le faire en créant des “classes de personnages”. Un écuyer peut progresser, devenir spadassin puis chevalier. Mais il peut aussi prendre une voie différente en se spécialisant sur un type d’arme ou une façon de se battre en particulier.
La magie peut ainsi permettre à tes joueurs de s’exprimer en fonction de l’utilisation qu’ils en font.
Le deuxième intérêt de la magie en jeu de rôle, c’est de servir l’histoire : tu peux soit créer plein de choses autour d’elle, soit simplement l’intégrer presque comme une compétence normale que tout le monde possède, et qui fait “juste parti du quotidien”.
Enfin, la magie va bien entendu interférer dans la partie ! Les joueurs, PNJ et même parfois les monstres & animaux va l’utiliser pour interagir avec l’environnement ou pour se battre les uns avec les autres. C’est pour cette raison que tu dois avoir une réflexion profonde sur celle-ci : à partir du moment où tu intègres un système de magie, celle-ci va avoir une grosse influence sur la campagne.
Qu’est-ce qu’un système de magie ?
Quand je parle de magie dans un jeu de rôle, je ne parle pas que d’effets spéciaux avec des sorts de feu et d’énergie spirituelle ! Non, la magie peut aussi être un système totalement rationnel.
Par exemple, dans le rôle play Nav-I que j’ai conçu sur le base de l’univers Megaman, la “magie” est en fait de la RAM. Autrement dit de la puissance de calcul d’un appareil.
Pour simplifier les choses, du côté Gameplay, la magie englobe tout ce qui est Power up, pouvoir supplémentaire utilisé par les personnages (joueurs ou non-joueurs) et globalement ce qui va influencer le cours normal de l’univers. Du côté narratif, elle peut avoir d’autres utilités. Par exemple, dans un univers de chasse aux monstres, il est tout à fait possible que seuls les monstres puissent utiliser des pouvoirs magiques.
Nous allons explorer tous ces aspects au fur et à mesure. Mais en ce qui concerne la magie, quoi de mieux que se tourner vers les travaux d’un pro du sujet : Brandon Sanderson. C’est un auteur de fantasy à succès (il a fait le plus gros kickstarter du monde !) et c’est l’un des écrivains les plus prolifiques et influent de la fantasy contemporaine.
L’un de ses gros points forts ? C’est pour l’élaboration de ses systèmes de magies innovants et ses intrigues complexes. Il a animé beaucoup de conférences et créé pas mal de contenu autour du sujet. Bien sûr, tous ces concepts sont pensés pour la littérature, mais ça nous donne de très bonnes bases pour démarrer.
Le Hard Magic System
Le Hard Magic System est un système de magie dans lequel les règles et les limites sont clairement définies et compréhensibles par tous. Dans un récit, le lecteur sait ce que la magie peut faire et ne pas faire, créant ainsi des attentes spécifiques : il a assez d’éléments pour comprendre d’où vient la solution magique.
Dans un rôle play, la situation est assez différente en fonction du contexte. C’est un point qu’on va beaucoup détailler un peu plus loin, mais ta magie peut être soit présente au cœur du gameplay, soit être découverte petit à petit par les joueurs.
Dans le premier cas, tu dois transmettre à tes joueurs des règles précises pour que tes joueurs puissent l’intégrer lorsqu’ils mettent en place leur personnage. Toujours dans mon exemple sur mon Rôle Play Nav-I, inspiré de Megaman, les joueurs vont de procurer des sortes de cartes SD contenant des pouvoirs. Ces pouvoirs ont un coût en RAM, et leur utilisation est strictement définie.
Si tes joueurs découvrent la magie, et que cette dernière fait partie de ton histoire, dans ce cas là il est important que tu détermines pour toi, maître du jeu, les règles de cette Hard Magic System afin de pouvoir l’intégrer correctement dans l’histoire.
Voici quelques exemples de Hard Magic System :
- Full Metal Alchemist : dans cet animé, les personnages utilisent l’Alchimie. Elle repose sur des principes de science et de transformation où, pour obtenir ce que tu souhaites, tu dois faire un sacrifice de valeur équivalent.
- Inception : Le principe du film est de partager et manipuler les rêves. Le film présente des règles claires sur la manière dont les différents personnages vont entrer dans les rêves d’autres personnes, créer des niveaux de rêves imbriqués et en manipuler la réalité de l’intérieur. Les limites et risques de ces actions sont également bien documentés.
- Mistborn : l’un des livres de Sanderson, où les personnages vont ingérer différents métaux pour obtenir des pouvoirs spécifiques, comme la capacité de pousser ou tirer des objets métalliques, augmenter leurs forces physiques ou encore améliorer leurs sens. Chaque métal à un effet particulier et sont parfaitement expliqué aux lecteurs
Si tu veux concevoir un Hard Magic System, tu dois donc définir comment elle fonctionne précisément.
Le Soft Magic System
Le Soft Magic System est un groupe de musique qui… ohhh ça va ! 😇 Non, en réalité, il s’agit d’un système de magie vague et mystérieux, où les limites et règles ne sont pas explicitement définies.
Ici, tes joueurs savent que la magie existe, ils savent qu’elle est puissante ou utile, mais pour autant, ils ne savent pas les tenant et aboutissant de celle-ci. Elle peut donner un sentiment d’émerveillement et d’inconnu, mais elle peut aussi frustrer tes joueurs, car il est difficile de prédire comment celle-ci influencera l’histoire.
Une autre particularité du Soft Magic System, c’est que certains personnages la maitrises (et donc ont cette connaissance), pour autant l’explication n’est pas donnée de façon précise.
Voici quelques exemples de Soft Magic System :
- Le Seigneur des Anneaux : La magie dans l’univers de Tolkien est présente, mais reste mystérieuse et peu expliquée. Par exemple, ce bon vieux Gandalf utilise des sorts, mais il n’a jamais pris le temps d’expliquer sa bonne vieille recette de grand-père (ni comment est-ce qu’il a appris à faire ça).
- Star Wars : La Force est une énergie mystique cheloue qui infuse dans l’univers et peut être utilisé aussi bien par les Jedis que par les Siths pour effectuer des prouesses surhumaines. Ses règles restent très vagues : on sait juste qu’elle dépasse les lois de la physique jusqu’à devenir sa propre règle physique.
- Princesse Mononoke : La magie est omniprésente avec les esprits de la forêt et les malédictions, mais ne laisse aucune explication détaillée sur leur fonctionnement. Elle est liée aux croyances spirituelles et à la nature, laissant beaucoup d’aspects à interprétation et à l’imagination.
Si tu veux concevoir un Soft Magic System, tu peux donc rester vague sur son fonctionnement, mais tu dois quand même définir certaines choses pour cadrer cette magie (comme nous allons le voir plus tard). Autrement, elle peut se transformer en Deus Ex Machina, et ce n’est pas quelque chose de très souhaitable.
Et si on mettait en place une cohabitation ?
Cette question ne vient pas d’Emmanuel Macron, mais bel et bien d’un point ultra capital à prendre en compte : rien ne t’oblige à intégrer qu’UNE SEULE magie dans ton univers ! Au contraire, tu peux en combiner autant que tu le souhaites.
Bien entendu, chaque système de magie va te demander du travail et de la mise en place. Dans Donjons & Dragons, le système de magie est inhérent aux différentes races et classes de personnages. Je ne t’invite pas à faire quelque chose d’aussi complexe.
Cependant, ça peut être très intéressant de combiner plusieurs magies, chacune avec leurs règles différentes, mais également combiner un système Hard et un Soft !
Je t’ai parlé de mon jeu de rôle inspiré de Megaman. La magie “Hard” serait la RAM, la puissance de calcul d’une machine pour pouvoir donner des pouvoirs aux personnages. Ainsi, mes joueurs savent exactement comment l’utiliser, qu’elles sont ses limites, et s’approprient le mécanisme comme élément de gameplay et scénaristique. La magie “Soft” de cet univers, c’est le Code Source. Humains & Nav-I peuvent manipuler du code et créer ou modifier certains éléments du cyberespace. Les règles à ce sujet sont très strictes sur les réseaux publics. Rien n’est clairement expliqué dans le jeu à ce sujet, mais certaines actions vont avoir des impacts sur le monde. La magie “Soft” peut avoir finalement bien plus d’impact que la magie “Hard”, mais est bien plus difficile à maîtriser.
La seule chose sur laquelle je te mets en garde, c’est d’éviter d’instaurer une trop grande complexité dès le départ. C’est le risque lorsqu’on crée son univers de 0 : certes l’exercice est passionnant, mais si on fait quelque chose de trop ambitieux dès le départ, tu augmentes drastiquement tes chances de ne jamais faire de partie. Plus un projet est gros et ambitieux, plus finaliser une première version est délicat.
Comment concevoir son système de magie
Rentrons dans le vif du sujet ! Si maintenant tu veux mettre en place ton propre système de magie pour ton rôle play, il te reste quelques éléments à mettre en place.
Définir son concept de magie
Sans doute la première chose à établir, c’est le concept de ta magie : comment est-ce qu’elle fonctionne ?
Concrètement, tu vas définir sur quoi baser ta magie. À ce stade, tu peux rester assez vague ! Est-ce que ta magie va utiliser les éléments ? Le Chakra ou le Ki ? Des objets ? Des rituels ? Le cycle de la lune ?
Par exemple, si on reprend l’exemple de Sanderson, il a mis en place un système de magie basé sur la consommation d’alliage, conférant différents pouvoirs télékinésique. C’est spécifique, mais ça permet d’avoir une première idée de ton système.
Comme dans tout ce qui concerne la création d’univers, tu vas partir d’idées vagues pour aller petit à petit dans le plus spécifique.
Définir l’essence de la magie
Une fois que tu as défini le concept de ta magie, tu vas en définir son essence. Autrement dit, qu’est-ce qui permet de l’utiliser ? Comment est-ce qu’elle va fonctionner ?
Si tu reprends l’exemple de Star Wars, la Force est basée sur les lois de la physique. Elle représente la volonté et les énergies du monde, et peut d’ailleurs s’acquérir par tous ceux qui poussent ce rite initiatique, que ce soit pour devenir Jedi, mais aussi un Sith.
La Force, elle se dresse contre les lois logiques de la physique. Quand tu tends le bras et que tu peux faire léviter des objets, attirer ou repousser des corps, c’est qu’elle surpasse même la gravité. En soi, la Force est presque une loi de la physique à elle seule.
Dans Naruto, le héros possède en lui une créature surpuissante qui a été scellée. Mais comme tout sceau, il est possible de le rompre. Naruto, lorsqu’il ne maitrise plus ses émotions, se laisse submerger par la puissance de la créature qui modifie son Chakra et lui permet de surpasser le ninja moyen.
L’essence de la magie correspond donc au fonctionnement du grand concept que tu as initié, sur quoi la magie s’appuie. Tu peux en choisir 1 seul, mais aussi les mixer (par contre, ça ajoutera de la complexité).
Définir son accessibilité
Un autre élément à déterminer, c’est l’accessibilité de la magie ! Et oui, comment est-ce que cette dernière va s’obtenir ?
Là-dessus, tu as une ribambelle de choix. Par exemple, dans My Hero Academia, la magie est génétique : un jour, un enfant est né avec un pouvoir qu’on appelle Alter, et depuis, ces pouvoirs se sont développés et transmis.
Chaque union permet de créer de nouveaux pouvoirs, ce qui fait que les différents personnages vont tous avoir un pouvoir magique différent qui lui procure un avantage et un inconvénient.
Tout le plot de l’animé, c’est que le personnage principal veut devenir un héros… mais qu’il n’a pas eu le bon tirage génétique ! Résultat, il n’a aucun super pouvoir. Il n’a donc pas accès à la magie.
Dans Harry Potter, les sorciers apprennent à utiliser la magie, mais les moldus eux n’en sont pas capables. La magie peut aussi, dans certains cas, s’apprendre ou encore s’utiliser avec certains objets ou artefacts.
Définir l’accès de la magie est donc capital pour créer un univers de jeu de rôle cohérent.
Définir la façon de l’utiliser
Enfin, chaque magie possède sa propre façon de l’utiliser. Est-ce qu’elle nécessite un rituel, un objet comme par exemple une baguette magique combinée à une formule magique ?
La façon de l’utiliser est obligatoire si tu utilises un système de magie Hard, mais tu peux rester volontairement vague sur un système soft puisque tu n’as pas besoin d’expliquer clairement comment fonctionne chaque élément.
Dans Full Metal Alchemist, l’Alchimie ne se pratique qu’avec un cercle de transmutation qu’il doit tracer au sol. Le fait de définir la façon de l’utiliser permet aussi d’envoyer un message clair à tes joueurs, si ces derniers peuvent s’en servir.
Ça leur permet également de comprendre quand un adversaire l’utilise. Par exemple, si tu réalises une enquête à propos d’un étrange pouvoir, tu peux définir la façon de l’utiliser sans la communiquer aux joueurs : c’est eux qui devront alors découvrir “le truc” derrière ce pouvoir.
Les 3 lois de la magie selon Sanderson
Si tu as défini ces 4 aspects, tu as déjà une très bonne base pour l’inclusion de ta magie dans l’univers de rôle play que tu crées. Bien sûr, il est possible d’aller beaucoup plus loin comme nous le faisons dans l’Architecte d’Univers, notre Masterclass dédié à la construction de mondes.
Pour terminer, je te propose de faire un dernier tour du côté de Brandon Sanderson, dont j’ai déjà parlé à mainte reprise. Il a établi 3 lois de la magie que j’aimerais te partager ici. Bien entendu, elles s’appliquent essentiellement au domaine du récit, donc je vais l’adapter au Role Play.
1. Plus le joueur comprend la magie, plus il sera capable de résoudre des conflits impliquant cette magie
Cette 1re loi signifie que, si tes joueurs comprennent comment la magie fonctionne, plus ils seront satisfaits lorsqu’ils devront l’utiliser pour résoudre un problème ou un conflit dans l’histoire.
Dans un récit, l’idée est que si le lecteur comprend comment elle marche, alors il pourra lui-même trouver la solution pour résoudre un problème en l’utilisant.
Bien entendu, cette loi favorise donc la création de Hard Magic System puisqu’elle nécessite d’avoir des lois précises avec des limites bien définies. Si celle-ci est vague, ou mal expliquée, ou juste mystérieuse comme le proposent les Soft Magic System, alors il vaudra mieux utiliser cette magie pour bâtir du mystère et de l’ambiance plutôt qu’elle soit centrale pour résoudre un conflit majeur.
2. Les limitations de la magie sont plus intéressantes que ses pouvoirs
Une magie type Deus Ex Machina, c’est très chiant ! J’ai souvent entendu ces histoires où un personnage va utiliser une énorme boule de feu et one-shot un ennemi avec.
Cette 2e loi souligne l’importance d’ajouter des contraintes et des limites dans un système de magie, quel qu’il soit. Les règles, les coûts, les dangers et les restrictions autour de l’utilisation de la magie rendent ce système bien plus intéressant. Elle évite d’avoir une magie surpuissante sans contrepartie.
Ajouter des limites va te permettre de créer des conflits plus riches. Concentre-toi donc sur ce que la magie ne peut pas faire, ou aux conséquences négatives de l’utiliser.
3. Approfondis ton système de magie avant d’en multiplier les éléments
J’adore cette loi parce qu’elle va pile dans le sens de la simplicité qu’on passe notre temps à promouvoir sur QuestMaker 😇 Ce qui est facile et simple s’améliore beaucoup plus facilement, et surtout te permet d’arriver au bout du projet que tu t’es lancé.
Il vaut donc mieux approfondir et explorer davantage les profondeurs du système de magie que tu as créé avant d’introduire de nouveaux éléments et pouvoirs. De cette manière, ton système sera plus riche et cohérent. Chaque composant va interagir de manière logique.
Il est donc préférable de concevoir un petit nombre de pouvoirs bien développés plutôt que de nombreux pouvoirs superficiels.
C’est quelque chose que j’ai personnellement vécu dans mon Rôle Play Nav-I, inspiré de Megaman. Les joueurs utilisent des sortes de cartes SD pour ajouter des Power up à leurs personnages.
Le problème ? C’est que lorsque j’ai mis en place ce système, j’ai dû dès le départ concevoir environ 80 sorts différents. Un enfer ! Et encore, je me suis limité. Résultat, mon système possède encore beaucoup d’incohérences, et il est maintenant plus difficile à corriger après 1 an de campagne. Mais il faudra bien le faire un jour ! 😱
Donne vie à ta magie et les Personnages qui l'utilisent
Un système de magie bien construit peut transformer ton univers de jeu de rôle, mais l’interprétation des personnages est tout aussi cruciale pour captiver tes joueurs et les plonger pleinement dans cet univers fantastique.
Que ton personnage soit un puissant mage ou un simple aventurier fasciné par les arcanes, savoir l’incarner avec justesse renforce l’immersion. Dans notre article Comment interpréter un personnage de jeu de rôle, tu trouveras des astuces simples pour jouer tes personnages avec authenticité, en utilisant des traits de personnalité, des tics de langage et des habitudes spécifiques.
Que la magie de ton univers soit basée sur des sorts puissants ou des subtilités de langage, ces techniques te permettront de donner plus de profondeur et de caractère à tes personnages.
À écouter : Notre podcast sur les systèmes de magie
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Cette discussion approfondie complète parfaitement les concepts présentés dans cet article. N'hésite pas à l'écouter pour avoir encore plus d'idées et de conseils pour créer ton propre système !
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